Route du Cantal

SAMEDI 29-08-20 Camping municipal de Fridefont sous les averses…. Et les éclaircies

les peuches

Après un tour sympathique dans un sentier balisé « peuches » (petites collines) à travers prairies et forêts touffues, nous méritons l’un des plus beaux moments de notre rituel de vacances. Dans les villages, nous repérons toujours une petite église, une petite chapelle à quelques pas de notre pause du jour. Laurent m’y offre un concert de flûte traversière. Remarquable parce que la profondeur de la nef, la hauteur des voûtes, l’épaisseur des murs, permettent dans ces édifices, une sonorité dont l’écho amplifie et feutre le timbre de la flûte. C’est magnifique. A Fridefont, église du XIIe, parfaitement entretenue, je m’installe à l’avant de l’église. Mais la résonance est telle que c’est une soupe de notes plutôt indigestes. Je propose donc à Laurent de venir près de l’autel. Un lutrin où reposent les pages du prochain office, pile à sa hauteur, lui fera un support idéal pour ses partitions. Le son ne résonnera pas entre les arrondis de la nef, et ce sera plus comestible pour moi, installée alors au fond de l’église. Car un peu de résonance enrichit le son, mais trop, c’est trop.
Au moment où Laurent s’installe au lutrin, une alarme stridente, assourdissante, épouvantable se déclenche. Tétanisés, les mains sur les oreilles, nous attendons d’interminables minutes que ce vacarme s’éteigne.

fridefont

Au moment où le calme revient, une vieille dame un peu décoiffée et les vêtements en vrac déboule très fâchée, dans l’église Elle fonce vers Laurent toujours debout derrière le lutrin, sa flûte dans la main, l’air parfaitement idiot. Et moi qui me tasse sur mon banc à l’arrière de l’église.
- C’est vous qui avez déclenché l’alarme. Z’avez pas vu le panneau ?
Laurent tout penaud se gratte le front,
- Ben non, désolé, je voulais juste faire une sorte de prière musicale. C’est pas autorisé.
Toujours revêche, la vieille dame,
- Si, c’est autorisé mais vous n’aviez pas le droit de vous installer là.
Pendant que je m’approche, elle se radoucit,
- Bon, vous êtes quand même sympas de pas vous être sauvés lâchement. La plupart du temps quand j’arrive, y’a plus personne, et là, je suis vraiment en colère.
Puis elle me regarde,
- Vous avez l’intention d’assister à l ‘office de 17h ?
Pas trop courageuse, je n’ai guère envie d’affronter une nouvelle colère je réponds stupidement.
- Pourquoi pas ?
Comme nous savons tous, ce genre de réponse sous entend pour le questionneur une réponse en oui… La dame devient tout sourire, prend le temps de redresser une mèche qui lui tombe sur l’oeil.
- Vous pourriez accompagner nos chants, il n’y a jamais de musicien ici.
Là, je fais signe à Laurent que sur ce point je ne me sens absolument pas concernée.
Ils se mettent donc d’accord tous les deux, mais faut quand même l’autorisation du « Père » qui officie et qui arrive fort à propos.
C’est un géant noir, allure décontractée. Il porte une petite mallette, on dirait un représentant pour machines agricoles. Mais de loin seulement. De près il n‘est guère avenant. Requête formulée par son ouaille favorite. Il semble peut enthousiaste, mais ne veut pas contrarier la dame. Et là c’est rigolo car Laurent ne sait pas quoi jouer, et le prêtre pas plus que Laurent ;
- Faites comme vous voulez, c’est une messe ordinaire, vous pouvez jouer aux moments de l’élévation, il y en a deux, et moins d’une minute chacune de vos interventions.
- D’accord, mais comment je saurai que c’est le moment ; vous me ferez signe ?
Haussement d’épaules agacés du curé,
- non, ce n’est pas possible pendant l’office je ne peux pas communiquer avec vous, et avec le masque en plus. Mais quand je finirai la prière,
(…..qu’il cite à toute vitesse et dont on ne repère aucun mot intelligible), je lève les mains au dessus de mon visage, pendant ce silence vous pouvez jouer… je le ferai deux fois…
Là dessus, il se dirige à pas lents vers la sacristie. Regards perplexes de Laurent qui épluche ses pages de notes sans conviction, puis se tourne vers moi.
- Tu me feras signe ? Et puis je joue quoi ?
Je lui suggère la gymnopédie de Satie, lent et douloureux, s’il le fait très lent, ça peut devenir très mystique. Et puis il connaît parfaitement, faudrait pas qu’il se vautre…
Les gens du village entrent en scène. Nous sommes surpris car c’est un tout petit village et l’assemblée compte une bonne trentaine de personnes. Aucun regard vers nous.
La messe se déroule avec tout son arsenal de prières, de chants, d’incitation au recueillement. De très jolis textes du nouveau testament sont proposés à notre réflexion. Quelques instants avant l’élévation, je touche le bras de Laurent et les notes de Satie montent et s’enchaînent avec douceur et majesté vers la voûte. C’est cristallin, enchanteur, magnifique. Les têtes se tournent vers le flûtiste, on oublie un instant que se déroule un office religieux. Quelques sourires heureux mais aussi quelques moues réprobatrices…
« car les braves gens n’aiment pas que…L’on suive une autre route qu’eux ! »

A la fin de l’office, lorsque lentement l’église se vide, Laurent décidément inspiré envoie une autre mélodie, « Ave Maria » … Moi, je suis enchantée, le public, je ne sais pas trop.
Lorsque nous sortons discrètement, les groupes qui papotent sur le parvis de l’église nous saluent presque timidement où nous ignorent. Quelle étrange expérience, presque onirique. D’ailleurs c’était un samedi, drôle de jour pour la messe du dimanche.

31-08 – viaduc de Garabit que nous devons comme vous savez à Monsieur Eiffel et qui permet au train de traverser la Truyère. Puis cap sur Saint Flour

garabit

Saint Flour

Notre route laisse apparaître au détour d’un pont un magnifique château sur son éperon rocheux. A ses pieds un sympathique espace herbeux nous attend pour la nuit. Un sentier monte vers le château mais nous repérons plus loin un panneau tout miteux presque effacé « cascade »…. Et bien entendu nous ne résistons pas à cet invitation.Chateau Sailhant

Quelle merveille, le sentier court à travers la forêt tantôt terreux, tantôt caillouteux, en descente un peu hasardeuses. On se rapproche, la cascade ronronne pas très loin. Et d’un coup nous sommes à quelques pas d’une plage de rochers. Une falaise nous fait face qui protège la grande vasque ou dégringole la cascade. Nous avons trouvé ce site formidable en fin de soirée et la lumière est étrange. Mais promis, juré, je reviens demain matin.

cascade

 

 

Mercredi 2 septembre.

Nous voulons tenter l’expérience d’un « buron ». Le buron ici, c’est une fromagerie d’estives. Autrement dit, en été, les paysans montent les vaches au pré et ces constructions de pierre un peu rudimentaire permettent de travailler sur place. La plupart de ces « burons » belles bâtisses de pierre noires sont aujourd’hui transformées en auberge de dégustation de l’aligot ou de ventes de fromages locaux. Notre Gps nous signale un « buron » qui fait de l’accueil pour les camping-caristes.
Nous ne sommes pas d’accord Laurent et moi, car la route que je vois sur la carte me paraît précaire, mais Laurent se fie d’abord à son gps… La dessus on n’est vraiment pas d’accord. Et nous voilà engagés dans une route à une seule voie mais praticable… on peut même envisager de croiser un vélo peut-être ? Croisons les poings, croisons les fesses…
Ça évolue, la route étroite devient une piste caillouteuse à ornières… Le top… Pourvu qu’on croise personne (quand je pense que par l’autre côté on arrivait par la route...d’accord c’était un peu plus long…) Bingo, un tracteur à remorque déboule d’un virage… Je propose à Laurent la stratégie d’Annette à La Rouvière, « tu t’arrêtes et t’attends qu’il bouge ». Ce que Laurent fait. Nous n’en revenons pas, le tracteur continue d’avancer, à quelques mètres il monte sur le bord de la piste avec sa remorque qui prend une inclinaison fort inquiétante… Et le paysan avec un grand sourire confiant nous fait signe de passer… On frôle le côté descendant du passage, mais ça passe… Rien que d’y penser, je tremble encore.
Quand on arrive au buron, c’est un espace paysan encombré d’engins agricoles, dans les caillasses où il sera difficile de caler le petit camion. Nous décidons donc de reprendre la route, « dans le bon sens »…
- Laurent tu veux bien couper la chique au Gps s’il te plaît?

Puy Mary

Nos journées se poursuivent avec de belles découvertes. Après le dure montée au Puy Mary, ouvert sur le vaste horizon des monts du Cantal, nous partons à la découverte de villes rustiques et belles. La campagne toujours verte, de vastes prairies, des forêts aussi sauvages qu’enchantées. Les fermes sont opulentes et majestueuses. De belles bâtisses en grès noir, chaque pierre bordée de blanc, flanquée souvent d’une ou deux tours au toits de Lauze qui pointent vers le ciel. Quel beau pays.
Après Salers,nous passons en Corrèze. Un bien beau département. Tout aussi champêtre, tout aussi rustique, tout aussi rurale. On adore.

Salers

 

Mais avant je dois vous dire que j’ai rencontré au Cantal, la vache la plus sublime de toutes mes rencontres de vaches. Les troupeaux de Salers inondent les prés d’animaux au poil ras brillant, couleur rouille ou acajou. Ces reflets leur donnent une silhouette harmonieuse pas du tout massive. Elle ruminent tranquillement avec majesté. Les cornes en forme de lyre se teintent de brun ou de noir à la pointe. Oh là, là, que ces vaches sont belles. Quelle classe !

Dimanche 6 septembre 2020
Marcillac la Croisille. Il faut que je me préoccupe de la lessive. Nous décidons de prendre nos aises et le confort d’un lave-linge et d’une sécheuse au camping du lac de Lavalette. Pas grand monde et nous bénéficions d’un grand espace sous un chêne plusieurs fois centenaires… qui pleut des glands… Ça nous fait rire… enfin moi surtout, quand ça tombe dans le pastis de Laurent.

C'EST QUI LA PLUS BELLE ?
VACHE sALERS

 


 

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