AU PAYS DES LAPINS HEUREUX

Pour TAMARA, Notre Précieux Lapin de Pâques.

1- DECEPTION

Khttp://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/1%20LAPIN%20CAROTTE.pngovka est un bébé lapin absolument magnifique. Sa maman et son papa sont fous d'elle. On la bichonne, on la caresse, on lui fredonne des petits airs rigolos ou tendres. Mais c'est une petite lapine très gourmande. Ça pose un problème à sa maman. Ce bébé n'est jamais rassasié. Docteur Chapitot, professeur véto-poupon, rassure en permanence la malheureuse maman.

- Vous savez, maman Lapine, votre bébé est en pleine forme. Elle est vigoureuse, elle pousse comme un beau plan de carottes. Elle a faim. Mais la faim est une excellente maladie. Et puis elle finira par se calmer. C'est comme ça les nourrissons. Il faut que passe ce premier âge de mise en place de tous les organes de ce petit corps. Des fois, c'est un peu compliqué, un peu plus long, mais ça s'arrange toujours.

Donc le papa et la maman émerveillés par leur bébé prennent leur mal en patience et rapidement les choses rentrent dans l'ordre. La petite lapine grandit. Plus elle grandit, plus ses parents la voient comme l'unique et plus fabuleuse merveille du monde.

C'est vrai qu'elle est mignonne avec son pelage doré. De magnifiques oreilles duveteuses en leur centre, ourlées d'une belle rangée de fourrure flamboyante. Comme de fières antennes, elles se dressent de chaque côté de son sympathique museau, lui aussi bordé de duvet clair. Mais ce qui séduit et vous attache à cette petite, ce sont ses grands yeux sombres. Bordés d'immenses cils recourbés, son regard s'attache sur vous telle une invitation à communiquer. C'est un regard qui vous interpelle, ne laisse personne indifférent. Quelle étonnante petite lapine. Ses parents,  admirent cette petite sans modération. C'est leur fille, c'est la plus belle.

Devenue plus grande, elle se frotte à d'autres individus qui lui ressemblent ou pas. Elle se socialise. Elle rencontre ainsi un jeune lapin fort arrogant, genre celui qui se croit irrésistible et se la joue un max. Kovka est encore bien naïve. Ils font quelques tours ensemble, grignotent de concert leur bout de carotte, ils flirtent discrètement. Romo, son amoureux la regarde avec des yeux langoureux.

- Tu es si belle, tu m'intimides... 

Ceci dit avec des mines, des sourires et des effleurements de pattes. Kovka se laisse séduire avec bonheur. C'est si beau d'être admirée par un garçon. Sa meilleure  amie la met en garde.

- Méfie-toi, Romo, c'est un chaud lapin... C'est tout du semblant, juste pour t'attendrir, un beau jour, il va te larguer pour une autre et tu souffriras.

- Pourquoi ferait-il cela ?

- Oh c'est simple. Quand tu seras tombée dans ses pattes, tu ne l'intéresseras plus. Il arrêtera de jouer avec toi.

Kovka est révoltée.

- Mais c'est n'importe quoi ! Ce que je sais, c'est que je suis la plus belle, et que des personnes d'exception s'intéressent à moi. Romo est ainsi, beau, charmant, spirituel et tendre... C'est pas de ma faute si t'as pas les arguments qu'il faut, toi... pour lui plaire !. Jalouse va !

 

Exchttp://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/5%20lapine%20sexy.jpegédée, son amie lui tourne le dos et retourne courir dans son carré de luzerne. Kovka s'en contrefiche. Elle reste une lapine comblée. Quelques semaines ....

Jusqu'au jour funeste où Romo vient la rejoindre avec une donzelle aux poils longs parfaitement lustrés. Quelle fourrure chatoyante ! Des yeux peints au charbon, des lèvres pulpeuses et gourmandes et des mines et des attitudes tout en grâce et en retenue. Kovka n'avait jamais vu  de lapine fatale, elle est subjuguée. Hélas, elle n'est pas la seule et très vite Romo se met au service de la belle coquette. Bien entendu, il néglige Kovka, dont les plaintes incessantes commencent à le lasser...

La petite lapine ne comprend pas ce qui lui arrive. Elle n'est donc plus intéressante. Ses parents se seraient trompés. Les adultes lui auraient menti. Il y aurait donc des tas de lapines "les plus belles, les plus merveilleuses" à travers le monde. Il faut qu'elle en ait le coeur net. Elle décide de quitter le doux foyer de sa famille. Elle ne prévient personne. Elle veut juste quitter ce monde injuste, le plus vite possible.

Un matin très tôt, elle jette un dernier regard sur son monde familier et lui tourne le dos en sanglotant. Sa souffrance, sa solitude sont immenses. Elle porte le poids d'une misère incommensurable. Elle traîne la patte, sa petite queue ne s'ébouriffe plus au souffle de la brise et son regard s'est éteint. Le soir tombe, elle continue d'avancer, à pas lents en poussant de gros soupirs. Elle se repose quelquefois, juste le temps de verser quelques larmes, et puis elle repart le coeur trop lourd. Ça s'appelle le mal à l'âme, c'est terrible. Ce mal vient de soi-même et on ne peut le guérir que par soi-même. Encore faut-il savoir comment s'y prendre, et Kovka qui n'a jamais souffert, est bien démunie pour trouver un remède.

 

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La solitude finit par l'apaiser. Un soir, elle prend le temps de regarder le ciel rose du soir. Il vire au brun puis s'assombrit, devient noir. Kovka très étonnée découvre une campagne qu'elle n'avait  jamais pris le temps d'observer. L'air est peuplé de mille froissements, brhttp://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/campagne%20nuit%202.jpeguissements, souffles et cris inconnus. De l'horizon montent les premières étoiles. Alors elle décide de se coucher au pied d'un cèdre, le regard perdu dans les lumières du ciel. En peu de temps, la voie lactée s'ouvre au dessus de sa tête et le ciel s'illumine. Sa coupole est trouée de mille bougies. La lune apparaît entre les nuages, se courbe humblement vers  Kovka qui n'a jamais vu de spectacle plus intense, plus profond, plus vertigineux.

La nuit se colore. Les ombres sont grises ou bleutées selon que ce sont des arbres, des prairies, des champs fleuris. Des arômes humides montent de la terre, humus, champignons, mousses... Le fardeau si lourd sur les épaules de Kovka s'allègent.  Un doux bien être l'envahit. Elle ne sait pas où elle va, elle ne sait pas de quoi demain sera fait. Mais la nuit lui promet  un ailleurs, une autre vie, avec quelqu'un qui l'attend et qui ne le sait pas. Quelqu'un qui lui ressemblera ou pas, mais qui l'aimera telle qu'elle est. Tout simplement. C'est la promesse de sa première nuit étoilée.

 

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2-AILLEURS-AUTREMENT

http://www.desescapades.fr/drupal/sites/default/files/lever%20jour%201.jpegLe jour se lève. Les bougies du ciel se sont éteintes. Derrière les dunes de prés et de champs, la ligne d'horizon devient rose. Puis la bordure s'élargit, couvre une large portion du ciel qui s'éclaircit. Et le soleil sort doucement des plis roses de l'horizon. Une araignée a tracé son chemin jusqu'aux moustaches de Kovka. Elle éternue, se réveille. Elle est vite sur pattes. Elle secoue son corps humide de  rosée. Elle frissonne un peu, pas longtemps. Campée sur ses pattes arrière, elle observe. Elle est un peu dépaysée, impatiente aussi de gambader à travers les collines.

La petite lapine bondit, libre comme jamais. Elle court à travers les herbes. Un papillon facétieux se pose sur son museau... Elle louche pour le regarder, un autre se pose sur une oreille....  pfuuit.... ils  sont  déjà partis. Quelle bonheur d'appartenir à ce monde magnifique, de faire partie du paysage. 

Un carré d'herbes odorantes lui offre une pause gourmande. Elle court après les insectes. Elle observe étonnée le convoi laborieux d'une colonne de fourmis. Elle flaire un beau scarabée d'or qui prend soudain son envol dans un lourd bruissement d'ailes. Il lui chatouille le museau en passant. Elle dérange un nuage de libellules. Elle les poursuit jusqu'à un immense champ de grandes fleurs jaunes la tête pieusement dressée vers le soleil.  Elle fonce dans la forêt inextricable des tournesols, s'emprisonne dans le labyrinthe de leurs tiges. Elle ressort éblouie au bord d'une mare... Depuis combien de temps, joue t'elle avec la nature ? Elle est exténuée.

Elle se laisse choir, la tête entre les pattes avant. Elle s'endort aussitôt.

 

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Pour les canards, c'est l'heure du bain, ils s'approchent curieux de la belle endormie.

- Coin, coin... chut les enfants, ne la réveillez pas !

- Coin, coin, chuchote le plus curieux des canetons en caressant  son front du bout de l'aile, c'est coin ça ?

- Ch....uoin, Ch....oin .... c'est une lapine, elle doit être perdue. Pauvre petite !

- Mais alors faut la réveiller, s'énerve un caneton impatient, elle peut pas rester là.

- T'as raison, de quel coin-coin, peut-elle venir ? Attendez,  réfléchissons.

Ainsi, s'interroge la tribu des canards. Ils discutent, ils s'interpellent, coicouinent tous en même temps, et de moins en moins discrètement.

Et réveille la lapine, qui n'apprécie guère. D'un coup, bondissant sur ses quatre pattes, prête à fuir, Kovka poussse de grands cris affolés.

- Où suis-je ? Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Au secours ...

Papa canard s'avance les ailes tendues devant lui, le cou légèrement rejeté en arrière, allure pacifique par excellence.

- Coin, coin, nous sommes les canards. Ici,  c'est notre mare. Mais toi, qui es-tu ?

A peine a-t-il fini sa question que tous les canetons parlent en même temps.

- Tu viens d'où ? Tu vas où ? T'as quel âge ? Pourquoi t'es toute seule ? Tu fais quoi dans la vie ? T'as faim ? T'as soif ? T'as une famille ?

Kovka s'est ressaisie. Elle s'installe tranquillement sur son arrière-train, secoue coquettement le désordre de sa fourrure.  Elle baille longuement, une patte devant le museau, comm le lui a appris sa maman.  Elle envoie un coup de patte arrière pour se gratter l'oreille gauche. Elle observe du coin de l'oeil la famille fort agitée des canards. Ils sont rigolos, tous pareils, tous très excités aussi.

En tortillant du popotin, maman canard s'avance, poussant sa progéniture devant elle.http://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/canetons%20jeu_0.jpeg

- Voici notre sizaine de canetons. Une belle famille n'est-ce pas ? Nous prenons un peu d'exercice avant la baignade. Ensuite, nous casserons une petite graine !

Kovka compte les canetons, ah oui, avec les deux qui se sont éparpillés dans les joncs, ça fait six canetons. Quelle sympathique famille. Conquise, elle se radoucit.

- Bonjour, ne vous inquiétez pas. Je ne suis pas perdue. Je suis juste de passage...

Elle se redresse, ébouriffe son poil, dresse les oreilles dans une pose avantageuse et reprend,

- Je m'appelle Kovka. Voyez-vous, je suis grande maintenant. Il est temps que je comprenne les choses de la vie.

- Fichtre, s'exclame Papa canard, t'auras besoin d'aide pour ça !

Il se tourne vers sa digne épouse

- Maman canard, crois-tu que nous puissions aider Kovka?

Maman canard ne doute jamais des qualités de son époux, ni de sa famille

- Coin-coin coiin, oui, bien sûr.

Soudain très confiante et plus  humble aussi, Kovka reprend sur le ton de la confidence.

- Si je pouvais rencontrer d'autres lapins, cela me permettrait de savoir qui je suis, pouvez-vous m'aider ?

Le concert des coins-coins reprend allégrement. La grosse voix de Papa Canard clame par dessus les criaillements et coups de trompettes intempestives.

- Bon, ça suffit les jeunes. D'accord . Notre communauté rassemble des tas d'espères d'animaux...

Maman Canard intervient à son tour,

- Enfin... Pour les lapins, c'est délicat, nous ne les fréquentons pas. Mais ils vivent à proximité. 

Le plus jeune des canetons se frotte depuis quelques minutes contre la fourrure de Kovka. Il passe doucement le bout de son aile sur l'ourlet fin de l'oreille de Kovka. Il lui chuchote

- Comme t'es belle et douce; t'es extraordinaire, j'avais jamais approché de lapine avant toi. C'est trop bon !

Et il se frotte contre elle, et il se vautre sous ses poils, et il la caresse avec émerveillement. Kovka le repousse d'un coup de patte rageur. Ses yeux deviennent tout rouges. Son poil se hérisse. Elle tourne sur elle-même comme une toupie. Elle crache, elle tousse... Elle est folle de rage. La tribu des canards recule effrayée. Les petits se sont tous réfugiés derrière Papa Canard, à l'abri de sa queue dressée, ils observent cette incroyable explosion de folie.

Mama Canard et Papa Canard n'en mènent pas large et se concertent à voix bassse.

- Qu'est-ce qui  lui prend ? Elle est pas nette cette lapine. Elle paraît même dangereuse. On fait quoi ? On s'coin-ce ? Non on s'casse !http://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/10%20canard%20file.jpeg

Maman Canard rassemble sa petite famille, leur montre la mare. Au signal de Papa Canard, avec beaucoup de classe, tous lui tournent le dos sur la pointe de leur pattes palmées. Toutefois, Papa Canard jette un oeil vers l'arrière pour s'assurer que la lapine ne fait pas un malaise. C'est un canard compatissant.

 

 

À sa grahttp://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/18%20lapin%20triste.jpegnd surprise, il voit la petite lapine se calmer aussi soudainement qu'elle s'est mise à hurler. Elle se rassied sur son arrière-train la mine contrite. Elle les implore d'une voix timide.

- Pardonnez-moi, je vous en prie. Voulez-vous me guider chez vous, s'il vous plaît. je vous raconterai tout en route.

 

 

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3- NOUVEAU MONDE

Ainsi cheminent-ils, l'une en gambadant, les autres se dandinant. Et puis, ils font une pause, et elle leur raconte, son enfance dorée, gâtée, du temps qu'elle était la reine des lapines. Elle raconte aussi son orgueil, tout le temps qu'elle a passé à se pavaner, à se bichonner, comme si cétait la chose la plus importante au monde. Elle raconte aussi Romo, le troublant personnage, qui s'est moqué d'elle, abusant de son innocence. Elle raconte aussi sa fuite. Elle raconte ses nuits à la belle étoile, toutes les merveilles qu'elle a rencontrées en route,. Elle raconte comme le monde est beau quand on ne lui demande rien, juste d'être là.

L'étonnante expérience de Kovka, son courage aussi a cloué le bec à tous les canards. Ils reprennent leur chemin en silence.

Quelques jours plus tard, ayant fait connaître son odeur, son sourire, sa bonne volonté, Kovka a trouvé sa place dans le quartier où vit la tribu canard. C'est maintenant une lapine joyeuse et généreuse aussi simple qu'élégante.

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La voici qui déambule dans le quartier Chat.
- Coucou, cha va bien ?

- Oui, chuper, cha te dit de faire un tour avec nous ?

Le plus jeune, le plus gourmand aussi, lève son museau de sa gamelle. Il lèche avec application ses moustaches.

- Mi....aou... Mia...miam, fichtrement bon tout ça. Cha'dore, t'en veux ?

 

http://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/chien%20%2A2%20dessin_0.jpeg Deux chiens s'immobilisent à son approche. Ils ont toujours envie de faire la course avec Kovka, mais à elle, ça ne lui plaît pas trop. Un coup malheureux de leurs grosses pattes pourrait l'assommer... Elle ne veut pas prendre le risque. Eux ça les fait rigoler.

- Woua eux.... veux-tu faire la garde avec nous ce soir ?

- Non merci. J'aurais trop la trouille.http://desescapades.fr/drupal/sites/default/files/agneau.png

 

Un sympathique agneau, qui vient d'être puni, bêle encordé à un piquet. Maman Mouton est très fâchée.

- Bêêê...tise sur bêêê... tise, il fait celui-là. Pas moyen qu'il reste parmi nous. Faut toujours qu'il aille vadrouiller... Pendant des heures je le cherche quelquefois.

Kovka ne trouve pas ça très grave. Le pré est bien fermé, il ne peut pas aller bien loin et puis les chiens veillent.

Elle finit par attendrir Maman Mouton qui va libérer son petit... Et les gambades reprennent joyeusement.

 

Bien entendu, c'est dans la tribu lapin qu'elle se sent vraiment chez elle. Elle s'est rendu compte, qu'autour d'elle, il y a beaucoup de lapines, charmantes et mignonnes. Il y a aussi Youra, celle-là, elle est  carrément canon. C'est sa meilleure amie. Donc tout va bien pour Kovka, réconciliée avec le monde dans lequel elle vit.

 

Jusqu'au jour où elle rencontre le timide Julius qui va bouleverser ses nouvelles certitudes.

 

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4 FLEURS ET TENDRESSE

Julius est un brave. Il adore les fleurs et quand on aime les fleurs on est forcément un brave. Il attendrit Kovka. Elle a l'impression qu'avec lui, elle est en sécurité. Il n'est pas très beau, et c'est pas un  athlète. Mais son regard est doux. Il parle avec délicatesse. Il sait écouter, conseiller aussi. Il est très patient, ne se fâche jamais. Et pour la tumultueuse jeune lapine, c'est un total apaisement de se trouver près de lui. Ils passent de longs moments ensemble. Ça se fait comme ça, ils se retrouvent toujours, un peu par hasard mais pas toujours. Ils ont de longues conversations sur leurs attentes, leurs déceptions, sur le monde tel qu'il tourne autour d'eux. Ils sont d'accord sur presque tout. Leur amitié sans heurts fait son bonhomme de chemin amoureux.

Un jour Julius attire Kovka sous une cerisier de fleurs blanches. Un souffle de vent léger décoiffe l'arbre. Un nuage de pétales blancs les inonde. Des papillons s'éparpillent dans la fourrure de Kovka. C'est magnifique et romantique. Julius la prend natuellement dans ses bras; il est un peu maladroit. C'est la première fois qu'il prend une lapine contre lui. Il se penche vers l'oreille à demi dressée de Kovka, et chuchote dans le duvet si doux.

- Kovka, je rêve de toi, je me nourris de ta présence. Dès que je te quitte, ta voix continue de chanter dans mon âme. Tu es la plus formidable lapine du monde. Tu es l'étoile de mes nuits, tu es l'astre de mes jours....

A ces mots, Kovka repousse son ami avec violence. Elle éclate en sanglots.

- Voilà, ça recommence. T'es comme les autre, t'es nul. T'es un menteur. Je te déteste. Va-t-en, je ne veux plus te voir !

Elle se retourne et sanglote de plus belle.

L'amoureux complètement épaté se demande bien ce qu'il a dit ou fait de si dramatique. Il reste cloué sur ses quatres pattes, l'air parfaitement stupide. Il était sincère, il croyait que Kovka partageait ses sentiments. D'accord, c'est la première fois qu'une fille l'attire à ce point. Mais au cinéma, ce genre de déclaration, c'est imparable. Où est l'erreur ?

Il se rapproche avec prudence de Kovka, lui cueille une grande feuille à déguster, une délicatesse, c'est une patte d'ours.  La patte d'ours, aucun lapin  ne lui résiste, c'est le mets d'exception pour un lapin.  Kovka regarde la plante. Il y a toute la détresse du monde dans ses yeux. Julius tente un sourire.

- C'est pas pour la manger, c'est pour essuyer tes larmes.

 Kovka amorce un sourire et se remet à sangloter.

Avec des gestes très délicats, Julius essuie les larmes de son amie.

- Dis-moi, que se passe-t-il ? Qu'est ce que j'ai fait de si grave ?

Oh là, là, comme la vie est difficile quelquefois. Kovka ne sait plus où elle en est. C'est vrai, il a l'air vraiment désolé son ami. C'est vrai qu'il ne lui a jamais fait de mal. Il ne l'a jamais trahie. Ce doux frisson le long de son échine quand elle le voit apparaître au bout du pré, c'est extraordinaire, non ? Il est si mignon avec l'incontournable bouquet qu'il lui cueille à chacune de leur rencontre. Alors, elle redresse la tête, elle renifle un grand coup. Elle ne crie pas, elle ne tape pas du pied. Elle lui annonce juste, calmement avec un rien de désespoir.

- Je suis déçue. Tu es comme les autres. Ceux qui flattent, ceux qui trompent pour mieux séduire. Je sais bien que je ne suis pas si magnifique que ça. C'est pas la peine de sortir ton grand jeu de séducteur. Ça ne marche pas avec moi. Notre amitié ne méritait pas ça. Tu me déçois, oh mais tu me déçois ...

Elle marque une pause, puis termine sur ce mot terrible :

- définitivement.

Elle se laisse tomber sur le ventre. Le museau entre ses pattes, elle recommence à sangloter. 

Pauvre Julius, il ne sait pas comment ratttraper sa maladresse. Il lui explique qu'il était sincère, qu'il ne cherchait pas à la séduire, ni à la tromper. Il était si émerveillé, si heureux aussi. Il s'étale en face d'elle, la regarde d'un air espiègle.

- D'ailleurs, j'ai jamais eu besoin de te séduire, ça marche bien entre nous, non... Tu m'aimes bien un peu...

Elle pousse un gros soupir, reste un instant perdue dans ses pensées.

En rampant, Julius se blottit contre Kovka. Il dépose une tendre léchouille dans le creux de son oreille.

- Ça, c'est une p'tite bise pour les incomprises. 

Elle redresse la tête et parvient à sourire. 

- Tu te moques encore de moi ?

Alors, Julius se dresse sur ses pattes avant. 

- Non je ne me moque pas de toi. Tu es le top du top des lapines du monde... Et je te veux pour moi tout seul, na !

Il pose sa patte sur le museau de Kovka prête à réagir encore; et termine avec un sourire irrésistible.

- Kovka, tu seras toujours la plus belle pour ceux qui te regardent avec les yeux de l'amour.